Véritable pionnière au Canada dans la fabrication du tofu, l’entreprise gatinoise La Soyarie vit au rythme de la croissance depuis sa création en 1979. À tel point qu’un nouveau déménagement devient nécessaire, dans des locaux plus grands, afin de répondre à la demande à la hausse de ses clients au Québec et en Ontario.
Ce récit fascinant, au cheminement peu orthodoxe, débute au milieu des années 70 par l’arrivée au Canada de Koichi Watanabe, un jeune Japonais qui décide de partir à l’aventure vers d’autres cieux. Après une courte incursion dans le Nord de l’Ontario, il vient s’installer à Ottawa. Il exerce de menus emplois et a de la difficulté à les garder parce qu’il parle peu l’anglais à l’époque. Devant ces obstacles, il décide de créer son propre emploi en fondant son entreprise.
« J’ai eu des difficultés d’adaptation dans mon nouveau pays et je peinais à garder mes emplois, même celui de plongeur, raconte-t-il. J’ai vécu dans une coopérative avec des amis et l’un d’eux possédait Le livre du tofu, considéré aujourd’hui comme la bible de l’industrie, et ça m’a rappelé que mon frère aîné Masaru, qui habite toujours au Japon, possédait de l’expérience dans la production du tofu. Ça m’a donné l’idée d’en fabriquer au Canada. »
Avec les conseils et l’aide financière de son frère Masaru, et armé de persévérance, M. Watanabe prépare sa première production de tofu dans son appartement. Une fois satisfait de la qualité de son produit, des restaurants orientaux deviennent ses premiers clients. Le carnet de commandes augmente et M. Watanabe décide de louer un local sur la rue Saint-Étienne à Hull. Un investissement de 225 000$ au début des années 80 afin de produire 900 kilos de tofu par jour.
DES EXPANSIONS À RÉPÉTITION
Il faut savoir qu’en 1979 le tofu était méconnu au Canada. Fabriqué à base de fève de soja, le tofu est un produit végétarien qui remplace les protéines d’origine animale dans la préparation des repas. Aujourd’hui, cette protéine végétale est fortement consommée au pays. C’est ce qui explique la croissance constante de l’entreprise depuis sa fondation.
Afin de répondre à la demande, M. Watanabe a ainsi graduellement ajusté sa production en ajoutant au fil des ans des lignes de production et en déménageant dans des édifices plus grands. C’est en 1985 que l’entreprise s’installe au parc industriel de Hull. En 2004, un investissement majeur permet l’achat de nouveaux équipements afin de doubler la capacité de production. En 2017, la capacité de production est à son maximum et un agrandissement de l’immeuble permet l’installation d’un autre système de pasteurisation. Un an plus tard, il faut penser à l’achat d’un nouvel immeuble, plus grand, afin de répondre à la demande.
Un nouvel édifice a été acheté en 2018, soit l’ancien bâtiment des Aliments Martel du boulevard Lorrain à Gatineau. Il sera opérationnel entre les mois de mars et mai 2020. Deux lignes de production seront en opération et une troisième devrait l’être un an ou deux ans plus tard, selon la demande. À terme, la nouvelle usine aura 65 000 pieds carrés, soit trois fois la superficie de l’usine actuelle du parc industriel de Hull. Un investissement de 3 millions de dollars.
L’entreprise passe donc du secteur de Hull au secteur de Gatineau. Au départ, M. Watanabe avait des craintes quant au transport de ses employés. Cette crainte a été amenuisée depuis qu’il sait que son nouvel édifice est voisin de la future station du Rapibus.
LA QUALITÉ EXPLIQUE LE SUCCÈS
« Je suis parti de pas grand-chose et, ensuite, j’ai eu de l’aide gouvernementale et des prêts bancaires pour chacune des étapes d’expansion, explique M. Watanabe. Je ne suis pas issu d’une famille qui est en affaires. Je n’avais pas de modèle et je n’avais pas de stratégie. J’y suis allé d’instinct avec l’idée première d’offrir un produit de qualité. »
Le propriétaire de La Soyarie a toutefois toujours su bien s’entourer, autant au niveau de son équipe de gestion que de ses employés, mais également par les organismes économiques dédiés à aider les entreprises. Particulièrement, au cours des deux dernières années, il a reçu l’appui du commissaire d’ID Gatineau, Denis Bureau, dans le projet d’expansion qui prend forme actuellement.
« L’aide d’ID Gatineau m’a permis de réaliser ce projet d’expansion plus facilement. J’apprécie tout le soutien que j’ai de l’équipe d’ID Gatineau, particulièrement de Denis Bureau. Il a les contacts pour m’aider à tous les niveaux, surtout avec les questions environnementales et économiques. Sans lui, il m’aurait été difficile de penser à mon dernier projet d’expansion. C’est comme mon employé, sans l’avoir sur la paye », dit-il en riant.
ID Gatineau est justement là pour faciliter l’arrimage de ces entreprises. « Au début, je suis intervenu pour des problèmes environnementaux, explique-t-il. J’ai aidé à trouver des compromis et des solutions. Nous sommes aussi entre autres intervenus pour trouver du financement, notamment auprès de Développement économique Canada, Investissement Québec et le MAPAQ. Notre implication consistait aussi à supporter les promoteurs dans la bonification du plan d’affaires et du plan de financement, en sus des prévisions financières, de la recherche des partenaires financiers et diverses rencontres sur les questions environnementales. Pour les enjeux environnementaux, nous avons également organisé une rencontre d’échanges avec les propriétaires de La Trappe à fromage qui vivent la même réalité. Le partage des expériences, c’est toujours très efficace et pertinent. »
TOURNÉE VERS L’AVENIR
La Soyarie célèbre ses 40 ans cette année. Son fondateur a toujours cette lueur dans l’œil qui l’anime depuis le début. Les prochaines années s’annoncent prometteuses pour l’entreprise gatinoise puisque les produits de tofu sont de plus en plus en demande au Québec et au Canada. D’ailleurs, il est l’un des trois plus importants fabricants de tofu au Canada et il se classera deuxième avec l’expansion en cours. Il sait que la cadence de la production augmentera mais assure que la qualité des produits demeure au cœur des opérations.
« Mon objectif est de mettre Gatineau sur la carte avec les produits de tofu, lance M. Watanabe. D’autant que l’aide financière actuelle est importante pour l’automatisation. Notre projet d’expansion est arrivé au bon moment. Toujours sans compromis sur la qualité. Même le chef Ricardo a admis à son émission que nos produits étaient les meilleurs. »
Signe que l’entreprise est en santé : ce sont les distributeurs, et non l’inverse, qui frappent à la porte de la Soyarie afin d’obtenir les produits! Le Québec achète 70% de la production et l’Ontario, 30%. D’ici deux ans, l’entreprise devrait compter une soixantaine d’employés. La Soyarie offre en tout une trentaine de produits différents à base de tofu. Les burgers au tofu ayant notamment la cote auprès des consommateurs.